Du 10 février au 26 juin, la Philharmonie de Paris célèbre le centenaire de la naissance de Xenakis, personnage complexe, architecte rigoureux et musicien matheux ou plutôt tout à la fois.
C’est ainsi que dans l’exposition Révolutions de Xénakis, les 6 espaces de ses passions s’entremêlent : Panthéon intime, Pavillon Philips, Alliages, Polytopes, atelier de l’artiste, machine et dessin . L’entrée s’effectue dans un décor de fils tendus comme des fils d’acier qui servent en architecture.
« Jamais l’un sans l’autre, jamais l’un pour l’autre » fait remarquer l’un des 2 commissaires d’Exposition pour évoquer les différentes compétences du Maître. Cela donne un parcours étonnant et attachant où les effets lumineux croisent les notes de travail, la vie personnelle du musicien et ses réalisations.
Un pari osé pour la Philharmonie
Faire découvrir la richesse de Xénakis et rester accessible à un public souvent novice n’est pas facile, la Philharmonie a réussi son pari en donnant du corps et de la créativité à l’exposition aidée pour cela par les 2 commissaires d’expositions :Mâkhi Xénakis, la fille de Xenakis avec Thierry Maniguet. La scénographie de Jean Michel Wilmotte en partenariat avec la Fondation Le Corbusier s’exprime dans une présentation grandiose remplie d’effets lumières surprises qui interpellent les visiteurs mais présentent aussi les moments d’intimité du créateur avec la reproduction de l’atelier d’artiste.
Accompagner
Qu’importe le débat de spécialistes entre musique moderne, contemporaine, expérimentale, avant gardiste, il n’y a qu’un son universel même si on a le sentiment qu’ au delà de l’émotion premiere ressentie, il y a besoin d’un apprentissage, voir un décryptage nécessaire de la musique pour mieux l’appréhender et, pour cela, la Philharmonie suscite notre intérêt.
Quand le dessin devient son
Xenakis ose s’extraire des codes de la musique existante pour créer une musique contemporaine, étonnante, désarmante, désarçonnante et avant-gardiste.
Premier à utiliser l’ordinateur pour la composition de ses œuvres, Xenakis explore la musique stochastique et compose près de 150 opus sous l’influence de son maitre Olivier Messian.
C’est aussi un chercheur, auteur de la loi Xenakis, qui, aux premiers balbutiements de l’informatique, crée, vers 1980, la machine UPIC, une machine qui permet à chacun de transformer visuel et dessin en son et que l’on peut admirer au musée de la Musique, toujours au sein de la cité de la Musique.
Et l’architecture s’exprime
Après le spectacle son et lumière du Pavillon Philips crée par Xénakis au sein de l’équipe Le Corbusier pour l’Exposition universelle de Bruxelles de 1958,
on y découvre la présentation des œuvres architecturales comme le couvent de la Tourette, un couvent de dominicains situé à quelques kilomètres de Lyon dans la vallée du Rhone avec un travail étonnant effectué avec Le Corbusier ainsi que l’évocation des Polytopes, œuvres plurielles situées à Montréal, Persépolis, Mycène ou Paris mais aussi tous ses calculs sous forme de dessins pour constituer ses œuvres musicales.
Si Le dernier volet exprime les liens entre la danse et Xenakis avec un ballet chorégraphié par Roland Petit dans un décor de Vasarely, tout respire la précision mathématique.
Xénakis, visionnaire d’un monde nouveau
Dans ces dessins de villes construites en verticalité ou dans sa conception de l’Art et de la musique alliée aux mathématiques et à l’informatique, Xénakis est un visionnaire que seul le temps reconnaitra vraiment.
Dans le monde du son, il n’y a ni Art majeur, ni Art mineur, il y a de l’émotion, de la créativité, des idées et du partage alors qu’importe si la plus importante plate forme de musique du monde permet a des inconnus au talent éphémère de dépasser les 9 milliards d’écoute, l’essentiel est d’être présent et écouté, d’avoir de la visibilité et de l’audibilité et c’est le cas pour Xénakis avec en première oeuvre écouté dans son répertoire : » Métastaseis » sur Spotify.
Après tout, la valeur n’attend pas le nombre de streaming ou de likes.
Admirateur de la République de Platon, un livre qu’il ne quittait jamais, Xénakis a su mettre en avant dans ses œuvres l’homme dans la cité. Bien que décédé en 2001, une année symbolique dans le changement du monde, Iannis Xénakis est, plus que jamais, d’actualité.
Alors n’hésitez pas, emmenez vos enfants découvrir l’expo Hip hop à la philharmonie et faites le détour par Xénakis à la Citéde la Musique, ils seront ébahis et enchantés.
« Je suis né 25 siècles trop tard. »
Iannis Xénakis – 1922-2001